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☆☆☆ Hansen (prix « Nobel » 2013) récompensé sur ses travaux sur « la méthode des moments généralisés », de quoi parle-t-on ?

Dans l’actualité : la semaine dernière l’américain Lars Peter Hansen a été récompensé du prix « Nobel » d’Economie, le comité citant ses travaux relatifs à la méthode des moments généralisés.

 

 

La méthode des moments généralisés est une méthode d’estimation économétrique, le but étant donc d’estimer les paramètres d’une relation entre plusieurs variables. Nous proposons ici d’en donner l’intuition à travers son lien avec la méthode d’estimation la plus connue : les moindres carrés ordinaires (MCO).

 

L’exemple le plus simple souvent décrit pour présenter la méthode des moments généralisés est celui-ci. Supposons que l’on veuille estimer la moyenne d’une variable parmi une population : on note ce paramètre (la moyenne) w. En général nous n’observerons pas cette variable pour toute la population d’intérêt, mais seulement pour une partie (notre échantillon). Comment alors estimer ce paramètre ? La méthode des moments généralisés nous dira que le meilleur estimateur du paramètre d’intérêt ici correspondra à l’estimateur m qui est tel que :

E(w – m) = 0

Et on dira que cet estimateur satisfait la condition de moment ci-dessus (le « moment » n’étant rien d’autre que l’espérance dans ce cadre). On peut montrer très simplement que sous couvert d’hypothèses simples[1], le meilleur estimateur du paramètre d’intérêt (la moyenne) est la moyenne empirique de notre échantillon. On aura pour cela simplement remplacé les moments théoriques par les moments empiriques, en s’appuyant sur la loi des grands nombres[2].

 

Quel est alors le lien avec les MCO ?

 

Le cadre de la méthode d’estimation par MCO est différent, nous avons dans ce cadre une variable Y (le PIB par exemple) que l’on suppose reliée à des variables explicatives x1 (le taux d’intérêt) x2 (la compétitivité des entreprises)… Considérons le modèle simple :

Y = x a + e

Où a est le paramètre à estimer et e le terme d’erreur. Pour que l’estimateur des MCO (â) nous donne en moyenne une valeur proche du vrai paramètre unissant y à x (a), des hypothèses doivent être faites. Une hypothèse suffisante dans ce cadre[3]stipule que la corrélation entre les variables explicatives et le terme d’erreur doit être nulle, ce qui peut s’écrire sous la forme :

E(x e) = 0 pour chaque observation

Ce qu’on appelera hypothèse d’exogénéité dans le modèle MCO sera la condition portant sur le moment de (x e) dans la méthode des moments généralisés. Cette condition suffira pour obtenir exactement le même estimateur que l’estimateur des MCO.

En effet, sachant que l’on peut réécrire e = y – xb, on peut réécrire l’expression ci-dessus E(x (y – ax) ) = 0 ce qui s’écrit encore E(xy) – E(a(x2)) = 0 ou encore a = E(xy)/E(x2). Remplaçant les moments théoriques par les moments empiriques comme la méthode des moments le suggère, on obtient alors comme estimateur de a, â = cov(y,x) / var(x). Comparez cet estimateur à l’expression que toute personne débutant l’économétrie apprend dans ce cadre, c’est exactement la même !

 

Ainsi dans le cadre de la méthode des moments généralisés on utilisera les conditions que doit respecter notre modèle pour estimer le paramètre d’intérêt. Nous avons présenté ici un cas où cette méthode nous donne exactement le même résultat que la méthode des MCO. Cependant les résultats diffèrent lorsque l’estimation devient plus complexe (estimations robustes à l’hétéroscédasticité, variables instrumentales…) car la méthode ne peut plus se résumer ainsi. Hansen n’a pas à proprement parler « inventé » cette méthode, mais a développé son application dans des cadres beaucoup plus complexes (en l’appliquant notamment à la fameuse équation d’Euler en macro/micro-économie).

 

 

Julien P.

 

 

 


[1] Pour un nombre d’observations suffisamment importantes, et en supposant que les observations sont indépendantes et identiquement distribuées

[2] Dont la validité –dans sa forme forte- repose sur les hypothèses faites dans la précédente note de bas de page.

[3] Implicitement pas de constante supposée ici, on suppose que le PGD (processus générateur des données) est celui cité ici et que les x sont des variables aléatoires indépendantes.