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Consensus BSI S2 2018

Le Consensus de BSI Economics consulte un panel d’économistes évoluant en France et à l’international au sein de structures publiques, privées, institutionnelles et académiques. Le Consensus interroge ces spécialistes sur les risques économiques et financiers pour identifier les enjeux des prochains mois.
Consensus BSI Economics S2 2018 :
 
1. Commerce mondial et taux US : des interrogations
 
Si l’inversion partielle de la courbe des taux aux Etats-Unis n’était pas encore observée lorsque le panel de spécialistes a été interrogé, un éventuel ralentissement de la hausse des taux directeurs par la Fed a néanmoins été discuté. Ainsi, 55 % des économistes anticipent moins de 4 hausses en 2020, conforme donc à l’annonce de la Fed (hausse de 75 pdb en 2019). Les marchés financiers n’anticipent quant à eux qu’une seule hausse, de 25 pdb.
 

Lors de notre enquête, une hausse des droits de douanes américains sur des produits chinois était encore prévue au 1er janvier 2019, elle a depuis été reportée à mars 2019. Au vu des réponses du présent Consensus, trois résultats ressortent : (1) le commerce mondial se contracterait en 2019 (probabilité forte pour 57 % des sondés), d’importants volumes exportés auraient déjà été réalisés par anticipation, (2) ce ralentissement du commerce mondial proviendrait également du ralentissement de la croissance économique chinoise (probable pour 66 % des sondés) et (3) la baisse du commerce mondiale impliquerait un risque modéré sur les marchés actions : 42 % anticipent une probabilité moyenne d’une baisse des actions mondiales tandis que 26 % n’anticipent aucun effet.

 

Toutefois, l’anticipation d’une Fed plus prudente, des marchés actions résilients en dépit du ralentissement de la croissance chinoise est contradictoire. En 2016, les marchés financiers étaient prudents sur le nombre de hausses du taux par la Fed encourageant un report des flux vers les émergents, en particulier sur les marchés chinois. En ce sens, si un scénario pessimiste sur la croissance chinoise et une guerre commerciale étaient ajoutées au scénario de 2016, alors une stabilisation des marchés actions voire une hausse sembleraient difficilement atteignables.

 

Le ralentissement du commerce mondial devrait peser sur l’activité en Zone euro. Une première hausse des taux d’intérêt par la Banque Centrale Européenne n’est donc pas attendue avant 2020, selon la majorité du consensus. En parallèle, si les convictions sont fortes sur les risques institutionnels avec l’obtention d’un accord sur le Brexit (57 % des économistes) et une hausse du risque politique en Italie en vue des élections européennes (69 %), la trajectoire de l’Euro face au dollar américain ne fait pas consensus. Une baisse à 1,10 (1,14 actuellement début décembre, 1,18 en moyenne sur l’année 2018) ne convainc que 24 % des économistes. En cas de contraction du commerce mondial et du maintien de l’activité américaine, les facteurs économiquesconjoncturels (différentiels de croissance et d’inflation) soutiendraient la dépréciation de l’euro. 

 

En revanche, avec une remontée moins rapide des taux par la Fed, lesdifférentiels de taux d’intérêt deviendraient plus favorables à l’appréciation de l’euro. Ainsi, l’impact du ralentissement du commerce mondial sur l’euro constituerait un enjeu majeur en 2019 sur lequel le consensus sera particulièrement interrogé au cours du prochain semestre.
 
 
2. Des économies émergentes mises à l’épreuve
 
Seulement 19 % des économistes sondés considèrent comme faible la probabilité de voir la crise turque s’amplifier. Habituée à surprendre avec des chiffres de croissance élevée, la Turquie semble désormais être rattrapée par ses nombreux déséquilibres (internes : inflation, risque politique ; externes : change, besoins de financement élevés à CT en devises), justifiant le pessimisme du panel. Le pays, à l’instar d’autres pays importateurs de carburants, est vulnérable à la remontée du prix du pétrole.
 
Le prix du baril de Brent s’établirait entre 60 et 70 USD d’ici fin 2019 selon 42 % des sondés. Des stocks importants poussent l’OPEP à réduire sa production journalière (probablement autour de 1,2 million de barils/jour) en vue de faire remonter les prix du baril. L’Iran semble désormais « hors-jeu » sur ces problématiques, 55 % du panel ne voyant pas de solution concrète se dessiner avec l’Union Européenne pour contourner les sanctions US. 
 
 
L’ampleur du ralentissement de la croissance en Chine continue d’être déterminante pour évaluer les perspectives de croissance dans les pays émergents. Cependant, ce ralentissement reste toujours conforme aux attentes. Les autorités ont récemment pris des mesures (soutien budgétaire et monétaire) pour soutenir l’investissement dans les infrastructures et la consommation privée et ainsi prendre les devants face à la menace protectionniste. Ces mesures restent volontairement limitées à ce stade, les autorités ne voulant pas dévier de leurs autres objectifs (stabilité financière) et se laisser des marges de manœuvre. Dès lors l’activité économique ne devrait pas accélérer.
 
 
3. Quels risques pour 2019 ?
 

Les tensions sociales, politiques et géopolitiques sont identifiées comme un risque non négligeable sur la croissance des pays développés en 2019 et réunissent une large majorité (92 %) pour l’Europe. Le cas du Royaume-Uni, qui quittera l’Union Européenne fin mars 2019, continue de susciter les interrogations tant sur les contours du Brexit que sur son impact économique. L’Union Européenne et l’Italie ne parviennent toujours pas à ce stade à s’entendre sur un budget, une situation qui n’est pas de bon augure, à quelque mois des élections européennes de mai 2019. De même, les incertitudes restent de mise en Allemagne et les récents mouvements sociaux en France témoignent d’un contexte politico-économique délicat. Aux Etats-Unis, c’est davantage des aspects géopolitiques qui amènent 55 % des sondés à considérer que ce type de risque pèserait sur la croissance en 2019. Le caractère fortement imprévisible de la diplomatie américaine sous la Présidence de D. Trump provoque de fortes tensions, avec notamment des répercussions importantes sur le commerce mondial. En Amérique latine, ce risque est également significatif (84 % des sondés), alimenté par plusieurs facteurs : gestion des réfugiés vénézuéliens, crise politique au Nicaragua, arrivée du Président AMLO au Mexique qui inquiète les marchés financiers ou encore les élections générales en Argentine d’octobre alors que le pays traversera probablement une récession économique. En Afrique, ce risque restera élevé selon 66 % du panel, avec des enjeux électoraux et politiques importants : en Afrique du Sud, au Nigeria, en Algérie et en Tunisie.

 

 

Après une forte chute des principales devises émergentes face à l’USD en 2018, ce risque continuerait de peser en 2019 : en Amérique latine (87 % des sondés), en Asie émergente (79 %) et en Afrique (58 %). Le peso argentin, affecté par l’inflation et le risque souverain, sera notamment sous surveillance, tandis qu’une consolidation des finances publiques est attendue au Brésil pour éviter des pressions baissières sur le réal. En Asie, plusieurs devises pourraient notamment être menacées dans un contexte de remontées des taux fed funds : baht thaïlandais, ringgit malaisien, roupie indienne ou encore la livre turque. Au même titre en Afrique, c’est le rand sud-africain qui serait particulièrement vulnérable, tandis que des dévaluations au sein de la Zone Franc sont régulièrement évoquées.
 
En lien avec les estimations du FMI, le protectionnisme américain aura nécessairement des répercussions sur son activité économique (66 % du panel). Cela serait également le cas en Asie émergente (79 %). Les commandes à l’export ont déjà diminué au S2 2018 en Chine, avec des potentielles répercussions sur l’ensemble des partenaires commerciaux de la région. La trêve commerciale de 90 jours conclue début décembre 2018 entre la Chine et les Etats-Unis entretient une lueur d’espoir mais l’application des premiers tarifs douaniers pèsera nécessairement.
 
Le risque lié à l’éclatement d’une bulle obligataire en 2019 ne semble pas convaincre le panel à ce stade, même dans les pays développés.