Résumé :
– Les critiques post-crise adressées aux firmes sont canalisées par des organismes qui émettent des recommandations quant à la régulation de la gouvernance d’entreprise.
– Une mission parlementaire est amorcée début 2013 pour une réflexion constructive sur l’éthique, la transparence et la responsabilité des entreprises.
– Une grande importance est portée à l’image dégagée par la grande entreprise et la confiance qu’elle inspire à travers la mise en place d’un Haut Comité chargé du suivi de l’application du code de gouvernance, et la mise en exergue d’un comité consultatif pour mettre en relation l’ensemble des parties prenantes (dirigeants, actionnaires et salariés en interne mais aussi en externe ONG, concurrents, clients …).
La gouvernance d’entreprise est depuis le début du XXesiècle une préoccupation centrale de nos sociétés mondialisées dans lesquelles les firmes occupent un rôle incontournable et surtout, prennent le pas sur les régulations étatiques dans la gouvernance mondiale. En effet, les activités stratégiques à l’échelle de la planète ont rendu ces firmes, notamment via leurs activités de lobbying, puissantes et influentes. Par ailleurs, en période de crise l’idée que le salaire moyen d’un dirigeant d’entreprise du CAC40 puisse atteindre 2.25 millions d’euros interpelle à la vue du pouvoir d’achat aujourd’hui stagnant des salariés. Par ailleurs les préoccupations court-termistes des stratégies entrepreneuriales ont de quoi amener des interrogations supplémentaires quant au devenir du milieu industriel et productif. Le sujet n’est ainsi pas nouveau, mais pléthores de débats ont toujours lieu. Les révisions législatives s’accumulent avec certes des progrès mais sans réelle transformation dans la façon de penser l’entreprise. Ce contexte nous amène ainsi à nous interroger sur la nature et la situation de la gouvernance des entreprises en France, ainsi que des moyens possibles pour réformer et renforcer efficacité, légitimité et transparence.
Tout d’abord rappelons brièvement la définition traditionnelle et communément admise de la gouvernance d’entreprise. Il s’agit de dispositifs institutionnel et comportemental s’appliquant aux dirigeants d’entreprise dans leur manière de structurer leur activité et leurs décisions. Ce mode de gouvernement fait la synthèse des préoccupations économiques, financières, informationnelles et sociales de l’entreprise.
Cette thématique décisionnelle de l’entreprise est amorcée par les travaux de Berle et Means en 1932 dans The Modern Corporation and Private Property. Dans cet ouvrage, ils s’interrogent sur l’évolution de la grande entreprise et présentent, comme principe fondamental de finance de l’entreprise moderne, la séparation entre propriété et contrôle de la firme. Dès lors, les deux figures distinctes de l’actionnaire et du dirigeant d’entreprise apparaissent au cœur de ce que l’on a appelé « la révolution managériale ». Ces deux figures entrent régulièrement en conflit, qui est étudié dans le cadre de ce que l’on appelle la théorie de l’agence. Les actionnaires sont les apporteurs de capitaux et ils mandatent des dirigeants afin de mener à bien les stratégies financières de l’entreprise en question. Or, régulièrement on constate que les gestionnaires qui ont principalement pour objectif la croissance de l’entreprise et font preuve d’intérêts divergents de ceux des actionnaires, qui eux cherchent à maximiser le profit sur lequel ils récupèrent des dividendes. L’asymétrie d’information entre ces deux acteurs de l’entreprise peut amener à des défaillances dans la gestion de la firme.
Si l’on se réfère à la tradition de John Rogers Commons (1862-1945) qui défend l’importance d’un « capitalisme raisonnable », les années récentes ont fait naitre un besoin et une nécessité au quotidien de clarification de la gestion en entreprise. Il s’agit de repenser la façon d’orienter l’entreprise et de prendre les décisions, de recentrer les règles face à la multiplication des stratégies. La rémunération du capital ne doit pas être la simple finalité, la finalité dominante dans la firme. Commons met en effet un point d’honneur à articuler préoccupations économiques et juridiques afin de poursuivre des principes éthiques[1]. Les critères de répartition y sont soigneusement négociés et analysés et pourraient particulièrement bien être mis en perspective avec la période récente.
Gouvernance d’entreprise et actionnariat en France
En France, ces règles normatives de fonctionnement et de vie en entreprise sont établies au sein d’un code de gouvernance. Trois organismes s’occupent aujourd’hui de cette régulation selon diverses recommandations : la commission européenne avec son plan d’action sur le gouvernement et le droit des sociétés, l’association française des entreprises privées (AFEP) et le Mouvement des entreprises de France (MEDEF).
En réalité la France se dote de deux codes de gouvernance. Le premier est celui de l’AFEP-MEDEF qui est consacré aux grosses entreprises du CAC40. Un second, le code Middlenext est adapté aux petites et moyennes entreprises, à leur taille, la structure de leur capital et leur histoire. Il propose à toutes les PME des recommandations pour piloter et évaluer l’activité de l’entreprise.
Répartition de l’actionnariat :
Sources : IFGE, Institut de Recherche MiddleNext, BSI Economics
Comme on peut le constater dans ce graphique, la structure capitalistique des entreprises, prééminente pour déterminer les modalités de gouvernance, est majoritairement familiale pour les entreprises du Middlenext alors qu’elle est principalement constituée par des fonds d’investissement pour les entreprises du CAC40.
Dans un contexte de financiarisation, la finalité de chacune de ces entreprises diverge, entre une maximisation de la valeur actionnariale et la pérennité de long terme de l’entreprise. En effet, le fonds d’investissement a pour objectif d’obtenir un rendement élevé, alors même que la structure familiale est davantage axée sur la recherche d’un développement profitable et d’une continuité générationnelle. Il existe donc bien un modèle de gouvernance propre à la France et plus généralement à l’Europe avec une propriété de l’entreprise plus concentrée, propice à un meilleur monitoring.
Cependant, même si les entreprises du CAC40 connaissent une structure de leur capital plus dispersée, on y remarque également une part non négligeable d’actionnariat familial. Pour autant, les sociétés au capital dispersé ne sont pas absentes alors même que la réglementation française n’y est pas la plus avantageuse. Or, les valeurs, que les dirigeants d’entreprise diffusent, déterminent la structure même de l’entreprise et donc sa gouvernance. Ces valeurs sont subjectives et varient d’une personne à une autre. C’est pourquoi on considère aujourd’hui l’analyse de la gouvernance par ses aspects techniques comme la seule réalisable ; une gouvernance qui cherche à protéger l’intérêt des investisseurs financiers, à impliquer davantage les différentes parties prenantes, à répartir de manière plus équitable les flux dans l’entreprise …
Ainsi, la nature et la place du dirigeant de l’entreprise varie en fonction de sa taille. Pour les moyennes entreprises, le dirigeant est dans 75% des cas le premier actionnaire alors qu’il n’est que de 36% dans les plus grandes sociétés cotées. Or l’enjeu de gouvernance repose sur le fait que les impératifs de performance ainsi que la limitation des risques sont étroitement corrélés aux rémunérations des dirigeants. En effet, on considère comme une évidence que l’implication doit être rémunérée sur la base des résultats de l’entreprise. Pourtant, depuis 2013, une étude « innovante » de l’Ecole de Management de Strasbourg a vu le jour permettant d’expliquer que contrairement à ce que l’on peut penser, rien ne prouve que les salaires des dirigeants sont indexés sur les performances de l’entreprise qu’ils ont en charge. De plus ils mettent en exergue le fait que la création d’un Comité de Rémunérations aurait plutôt l’effet pervers, inverse, à savoir augmenter le salaire des dirigeants. Enfin, la présence d’administrateurs indépendants dans le conseil d’administration ne permettrait pas de modérer le salaire du dirigeant. Cependant aucune étude ne peut corroborer cette analyse et il est plus communément admis que la rémunération et les stock options se répartissent en tenant compte de l’intérêt général, de ce qui se pratique sur le marché et des performances du PDG dont les règles ont été fixé en début d’exercice.
En France, on constate que la forme moniste de direction (avec un conseil d’administration conduit par le Président qui peut cumuler les fonctions de Directeur Général (PDG)) est adoptée dans 75% des cas alors que la dotation d’un conseil de surveillance et d’un directoire par l’entreprise n’a lieu que dans 25% des cas[2]. Les entreprises ont librement le choix d’opter pour l’une ou l’autre de ces formes depuis 2001 en France. Il s’avère que chaque modèle possède ses avantages et ses inconvénients propres, et il est généralement admis que trancher la question ne peut se faire de manière générale. Il faut à la fois regarder la forme de l’entreprise mais également les principes la régissant, qui varient selon le pays en question.
Il apparaît que la principale raison du faible développement de la forme dualiste en France trouve son explication dans la crainte de perte de l’influence dominante dans le cadre des petites entreprises de type familial. En effet, ce modèle repose sur l’éclatement de l’exécutif entre un directoire (parmi lequel le Président) mais aussi un comité de surveillance devant lequel le directoire doit rendre des comptes. La gestion et le contrôle sont alors séparés. Dans ce second cas le directoire cumule les pouvoirs dans l’entreprise et doit donc être soumis à une surveillance qui implique davantage de formalismes, de rigidités car tout doit y être réglementé, y compris les flux informationnels. Dans les SA le directeur doit être indépendant, ce dernier doit être autonome mais ne peut l’être pleinement et mener son action à bien s’il ne dispose pas de l’information nécessaire.
Historiquement ce sont les marchés financiers qui ont mis en exergue l’importance d’une séparation des pouvoirs pour renforcer le contrôle d’entreprise, même si cela est arrivé relativement tardivement en France. L’enjeu du contrôle de l’entreprise est la modification de la répartition des flux entre les parties prenantes. De là, de potentiels conflits peuvent voir le jour, pouvant mettre à mal le fonctionnement global de l’entreprise.
L’adoption de l’une ou l’autre de ces formes reste à la discrétion de l’entreprise sans qu’aucun privilège ne soit accordé dans le cadre de la codification. Ainsi, aucune structure n’est imposée mais en revanche elle est surveillée et codifiée par les instances de l’AFEP et du MEDEF par l’élaboration de rapports annuels[3].
La possibilité d’une « bonne » gouvernance, claire et efficace ?
La recherche constante d’une « bonne gouvernance » apparait comme un objectif névralgique. Ce graal se manifeste à travers un enjeu de transparence qui peut être considéré comme la conséquence éthique de la gouvernance. L’entreprise se voit dans l’obligation de divulguer un certain nombre d’informations sur son fonctionnement, de respecter ses engagements de contrats, de garantir la qualité de ses prestations ou produits …
Toute la question est de savoir quelle application de ces codes est effectivement en vigueur et quels objectifs ces règles cherchent-elles à satisfaire? Les intérêts des actionnaires ? Ceux des autres parties prenantes ? Et quels effets pervers la codification a-t-elle en retour ? Cette volonté de transparence et de responsabilité se pose dans une période de perte de légitimité des acteurs, de lutte contre la corruption … mais aussi dans un contexte de mondialisation qui impose adaptabilité, crédibilité et culture d’entreprise comme déterminant de la concurrentialité de l’entreprise. La question qui porte à débat est en réalité très primaire puisqu’elle tourne autour du « A qui appartient l’entreprise ? Et comment l’entreprise peut-elle être efficace selon la répartition de la propriété ? »
On peut dresser deux grands enjeux du débat remis sur la table en 2013. Le premier porte sur la place à accorder aux salariés, aux dirigeants, aux actionnaires dans le fonctionnement de la gouvernance de l’entreprise. Le second s’intéresse à la mise en place d’un environnent réglementaire qui permette de maintenir à la fois le niveau d’investissement dans les entreprises mais aussi le tissu industriel français afin d’éviter perte d’emplois et désindustrialisation.
On a souligné dans la partie précédente une double activité en interne, avec les intérêts divergents entre le milieu opaque des affaires (à la tête duquel nous trouvons les dirigeants) et la transparence recherchée par les actionnaires et les salariés, les deux parties prenantes de l’entreprise. Il apparait ainsi un tryptique dans les débats récents entre transparence, légitimité et confiance autour des parties prenantes.
La transparence – n’échappant aujourd’hui à aucun domaine de la vie en société – renvoie en termes de gouvernance d’entreprise à des préoccupations de déficit de légitimité de la direction de l’entreprise. Elle est un attribut de l’efficience de marché et symbole de moralisation des règles de la vie des affaires. En mettant davantage de transparence dans l’organigramme d’une entreprise, ses relations internes et externes doivent être facilement analysables et compréhensibles, ce qui doit redorer la réputation et donc la légitimité de l’entreprise. Mais ce débat n’est pas exempt d’effets pervers et de questions à propos de la propriété entre les divers acteurs de l’entreprise. C’est ainsi la volonté de la Commission européenne d’ouvrir ce dialogue, un focus accru sur la transparence étant censé assurer le bon fonctionnement du processus décisionnel, responsabiliser les actionnaires et protéger les dirigeants[4].
Cependant, nous ne devons pas oublier d’avoir un esprit critique sur cet objectif –parfois illusoire- de transparence, puisqu’il ne résout pas tous les problèmes de gouvernance, et surtout soulève d’autres dérives non moins importantes. Cette exigence de transparence apparait essentielle pour un contrôle efficace. Cependant, cette notion peut aisément faire l’objet de manipulations au sein de la structure d’entreprise, quelques agents bien informés annihilant ses effets éthiques attendus. Cela est d’autant plus ardu que l’on considère un retournement de la révolution managériale avec la récupération par les actionnaires du pouvoir au détriment des dirigeants (les managers).
L’implication de la transparence est un accès simplifié aux informations pour l’actionnaire ce qui lui permet de renforcer d’autant plus sa position hiérarchique supérieure. Or ce dernier a, comme nous l’avons vu, davantage de finalités financières que productives, ce qui peut aller à l’encontre de l’intérêt des dirigeants mais aussi, et surtout, de l’intérêt généraldans la poursuite des objectifs industriels, dans le maintien du tissu productif.
Ainsi, suivant cet axe européen de cohérence sociale de l’entreprise, a été constitué en France un projet de loi sur l’encadrement des pratiques de rémunération ainsi que sur la modernisation de la gouvernance des entreprises. L’objectif est alors de contraindre l’attribution des salaires des dirigeants (qui doivent être approuvés par les actionnaires) et rester raisonnables par rapport à ceux des salariés. La capacité de contrôle par les actionnaires est légitimée par la détention « transparente » de parts sociales. Et il est vrai, qu’en tant qu’élément central de l’administration d’une entreprise, il était nécessaire de mettre en place un comité de rémunération consultatif.
Un point sur les réformes
Des annonces récurrentes par nos dirigeants politiques sont prononcées, débouchant sur des réglementations quant à l’évolution du fonctionnement des entreprises, de la prise en compte des différentes parties prenantes et du bilan à tirer deces nouvelles législations.[5]Déjà en 2010 Christine Lagarde se penchait sur la nécessité d’un observatoire pour PME cotées et parallèlement Alternext, plateforme européenne, assouplissait les modalités de cotation sur son marché réglementé. Cette préoccupation de gouvernance, ravivée suite aux dérives financières des années récentes, est à tel point un sujet d’actualité qu’elle a été l’objet d’une réflexion parlementaire au premier semestre 2013 donnant lieu à une mission d’information à l’Assemblée Nationale ainsi qu’à un rapport de l’AMF[6]. Ces tables rondes apparues dans les années 2000 s’interrogent sur des solutions aux critiques adressées aux entreprises, à savoir l’insuffisance des mécanismes de surveillance (monitoring) ou la rigidité des politiques salariales[7]. Lors du dépôt du rapport, l’Assemblée Nationale a précisé les trois objectifs qui ont motivé cette mission d’information :
« En premier lieu, instaurer un meilleur équilibre entre la loi et les codes de gouvernance, notamment en créant l’obligation pour les grandes entreprises de se référer à un code ; En second lieu, établir une gouvernance stable et ouverte aux diverses parties prenantes de l’entreprise : par l’octroi de droits de vote doubles aux actionnaires de long terme, par le renforcement du contrôle sur les conventions réglementées, ou encore par l’instauration d’une représentation obligatoire des salariés au sein des conseils d’administration ou de surveillance ; En dernier lieu, favoriser une gouvernance responsable, au service de stratégies de long terme : par la création d’une procédure d’action de groupe accompagnée de sanctions pécuniaires plus efficaces en cas de gestion fautive ; par le renforcement du poids du vote de l’assemblée générale des actionnaires dans le contrôle de la politique de rémunération des dirigeants ; par une réforme du régime des « stock-options » et des actions gratuites destinée à leur rendre leur vocation première ; par l’interdiction des rémunérations sous forme de « retraites chapeau ».
L’ensemble de ces propositions doit favoriser un changement des cultures et une moralisation des pratiques.»[8]
C’est alors aux pouvoirs publics de s’ériger en tant qu’arbitre pour redonner une dynamique saine à cette gouvernance. C’est pourquoi parmi les enjeux de ces diverses réformes françaises, il s’agit de donner une ligne directrice et en particulier des recommandations en matière de politique de rémunération des dirigeants. Ces rémunérations doivent être déterminées en conseil ou en comité afin d’adhérer aux valeurs de lisibilité et de cohérence. L’éthique est ainsi de mise, aussi bien en interne en termes de réduction des inégalités de rémunération et de traitement des agents que dans le rapport de la firme avec son environnement. Pour autant en avril 2013 la Commission Européenne a estimé qu’une modification devait être effectuée notamment dans la visée de développement et de médiatisation de ce que l’on appelle désormais la RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises).
Cette dernière actualisation du code de gouvernance permet un renforcement de la législation sous la forme de vingt propositions dont nous tentons de résumer le substrat. Les parties prenantes, dont les salariés, doivent tenir une part croissante dans la prise de décision et dans le fonctionnement de leur entreprise. C’est pourquoi est requis :
- la mise en place d’un Haut Comité de gouvernement d’entreprise indépendant afin d’assurer un suivi des principes du code adoptés par l’entreprise (diversité au sein des conseils d’administration nécessaire pour la représentativité, séparation de la fonction de président et de directeur général), interprète les dispositions et fait les mises à jour nécessaires. C’est un comité d’éthique parallèle au président directeur général qui est composé du président du conseil d’administration, de trois dirigeants d’entreprises (Valeo, Pierre et Vacances, Michelin) et de trois personnalités qualifiées en droit et en finance.
- un vote consultatif en interne sur la rémunération des dirigeants mandataires sociaux[9]dans le cadre de l’exercice comptable et une limitation du mandat de ces derniers ;
- des indemnités plus transparentes dans leur mode d’attribution, leur justification et montant ;
- une transparence accrue également dans la nomination des administrateurs et leur rémunération.
Les principales avancées de cette nouvelle révision visent le contrôle de l’application du code de gouvernance, l’approfondissement du principe de consultation ainsi que le renforcement de l’encadrement de la rémunération (notamment des stock-options).
Cette prise de conscience et cette recherche d’amélioration sont notamment corrélées au fait qu’aujourd’hui rien n’oblige les entreprises à adhérer au code de gouvernance, et surtout elles n’ont pas pour obligation d’expliciter le motif de refus. La commission ainsi que l’AMF avaient déjà manifesté en février 2013 leur volonté d’imposer des sanctions en cas de refus d’adhésion. Le but est de clarifier des questions qui sont amenées à discussion lors des périodes d’assemblées générales (le calendrier étant dans les 6 mois suivant la clôture de l’exercice comptable donc entre le 1erjanvier et le 30 juin).
Conclusion
L’actualité des entreprises en 2013 et 2014 fait écho à ces volontés de changements en matière de législation et de droit de l’entreprise, pourtant plutôt étoffée en France, et sur la pertinence des structures en interne. La mission parlementaire a porté son dévolu sur la question de la crédibilité des entreprises car son impact n’est pas seulement interne mais concerne l’état de santé de l’économie toute entière. La recherche d’une gouvernance stable mais ouverte est ainsi de mise dans une perspective d’intégration européenne.
Cependant, remarquons pour l’anecdote que cette recherche de transparence dans l’entreprise est historiquement associée à des scandales industriels et financiers (cf l’affaire Enron-Andersen ou Worldcom en 2002 ).C’est toujours dans ce contexte que sont interrogées les « bonnes » pratiques de gouvernance. La tendance 2014 dans les assemblées générales apparait avoir portée sur le « say on pay »[10]. C’est-à-dire sur le vote consultatif des actionnairespour prouver l’efficacité du comité,car la Commission européenne cherche à établir un ratio mettant en relation le salaire moyen et celui du dirigeant d’entreprise afin d’harmoniser la politique de rémunération de quelques 10 000 entreprises de l’Union.
D’autres problèmes vont encore être soulevés dans les mois à venir en matière de structure entrepreneuriale comme par exemple le rapport avec le quota de femmes, d’étrangers … Mais attention, comme le souligne Michel Prada, ancien président de l’AMF, il faut se méfier de la « regulatory fatigue » …
Références:
– « Panorama des pratiques de gouvernance des sociétés cotées française », Ernst & Yougn et Associés, 2013.
– « Structure de gouvernance de l’entreprise : critères de décisions », IFA, janvier 2013.
– « Rapport de la mission d’information sur la transparence de la gouvernance des grandes entreprises », Assemblée Nationale, 20 février 2013, n°737 : http://www.assemblee-nationale.fr/14/rap-info/i0737.asp
– « Rapport sur les entreprises faisant référence au code de gouvernement Middlenext pour l’exercice 2011 », Institut Français des Gouvernements d’Entreprise, Avril 2013.
– « 20 ans de distribution de dividendes en France 1992-2011 », IFGE, mai 2013.
– « Code de gouvernement d’entreprise des sociétés cotées », AFEP-MEDEF, juin 2013.
– « Rapport 2013 de l’AMF sur le gouvernement d’entreprise et la rémunération des dirigeants », octobre 2013.
– « Gouvernance d’entreprise : que cache le discours sur la transparence ? », document de recherche Institut d’administration des entreprises Orléans, Dominique Bessire, 2003.
Note:
[1] Par éthique on entend que les dirigeants aient des préoccupations dépassant les objectifs de rémunération maximale des actionnaires, un certain nombre de responsabilités envers les parties prenantes, des considérations environnementales, le respect des droits de chacun … L’éthique se décline ainsi dans les différentes sphères dans lesquelles l’entreprise est présente.
[2] Cette forme dualiste nous provient du modèle allemand et n’a été, comme en Allemagne, instauré en France que de manière optionnelle (à partir de 1966 en France).
[3] D’autres acteurs participent a l’activité de régulation de la gouvernance d’entreprise et parmi eux on peut citer: l’AFGE Association Française de Gouvernement d’Entreprise, l’AMF Autorité des Marchés Financiers, l’AMRE Association de Management des Risques et des Assurances de l’Entreprise, la confédération européenne des associations d’administrateurs…). Et notons tout de même que le mode de gouvernance adopté ne détermine pas les modalités de la prise de décision.
[4] Le lecteur intéressé pourra aller regarder les implications du livre blanc de 2005.
[5] Ce sont ces thématiques qui sont traitées dans la Loi Sarbanes-Oxley (2002) aux Etats-Unis ou encore la LSF, la loi de sécurité financière en France (2003)
[6] Publication de l’Autorité des marchés financiers en octobre 2013, 10erapport annuel sur la gouvernance d’entreprise et la rémunération des dirigeants des sociétés cotées. Il s’agit d’un état des lieux sur la pratique d’entreprise auprès de 60 sociétés suivant la ligne Afep-medef.
[7] Notamment avec une indexation incomplète des salaires à l’inflation.
[8] Présentation de la mission d’information sur la transparence de la gouvernance des grandes entreprises, en ligne : http://www.assemblee-nationale.fr/14/controle/lois/transparence.asp
[9] Personne morale à la direction d’une entreprise.
[10] Le lecteur intéressé pourra consulter Say on Pay Comparaisons Internationales et Bonnes Pratiques de l’Institut français des administrateurs (IFA), novembre 2013.